Tribune : la diplomatie française au Moyen-Orient, entre silence contraint et résignation politique (Un article de Jules Pissembon)

​La diplomatie française, autrefois écoutée et respectée au Moyen-Orient pour son positionnement autonome vis-à-vis du bloc occidental, semble aujourd’hui réduite au silence.

Par Aujourd'hui la Turquie
Publié en Mars 2025

Ses porte-paroles, prisonniers d’une impuissance assumée, peinent à s’affranchir d’un cadre néocolonial qui limite leur influence et leur capacité d’action. Sur la question palestinienne, la France aurait pu faire entendre sa voix en s’engageant activement dans les efforts internationaux visant à mettre fin à l’impunité d’Israël. Elle aurait pu, par exemple, soutenir les initiatives sud-africaines, suspendre ses livraisons d’armes et conditionner son appui à l’État hébreu au respect du droit international, un cadre juridique qu’elle a elle-même contribué à façonner. Surtout, elle aurait pu s’appuyer sur un travail de mémoire déjà avancé pour légitimer une position nuancée, plutôt que d’afficher un soutien inconditionnel à un État aux ambitions coloniales et impérialistes. Au lieu de cela, les représentants français, sans doute freinés par un manque de volonté politique, se révèlent incapables d’adopter une position à la fois humaniste et conforme au droit international : Gérard Araud, ancien ambassadeur de France aux États-Unis et en Israël, admet sans détour face aux journalistes de Quotidien qu’ « il n’y a rien à faire » et que « l’on a la politique de sa puissance », illustrant ainsi une résignation qui en dit long sur l’impuissance diplomatique française. Pire encore : bien que l’ambassadeur adopte une posture critique face aux déclarations de Trump sur Gaza, il lui concède néanmoins le mérite de « poser les questions que l’on ne veut pas se poser : qu’est-ce qu’on va faire avec ces deux millions de Palestiniens qui vivent dans des ruines ? ». Une remarque qui, sous couvert de pragmatisme, traduit surtout un fatalisme face à une situation dramatique que la France aurait pu influencer. En renonçant à jouer un rôle actif, elle risque de s’exclure durablement des dynamiques de pouvoir à l’œuvre dans la région.