Début avril 2023, de nouvelles élections générales se sont déroulées en Bulgarie.
Elles devaient révéler une situation toujours aussi confuse dans ce pays dit des « Balkans orientaux » en opposition avec l'ex-Yougoslavie que l'on désigne souvent comme pays des « Balkans occidentaux ».
Ce petit État de près de 7 millions d'habitants fait partie, avec la Roumanie, des derniers entrants dans l'UE de la vague des années 2000. Bulgarie et Roumanie n'intégrèrent en effet l'UE qu'en 2007, alors que les autres États de l'ex-bloc de l'Est y étaient entrés en 2004. Ce pays agricole à la base, qui était l'un des principaux fournisseurs de tabac du temps de l'URSS, devait connaître une transition plus lente lors de la fin de la guerre froide, et attendre le début des années 90 pour connaître l'installation d'un état démocratique moderne.
Le passé du pays remonte au haut Moyen à‚ge, à la période des rapports alternativement d'alliance et de tumulte avec l'Empire byzantin voisin. Tout changera à la fin du XIVe siècle avec l'implantation de l'Empire ottoman dans la région. Il faudra attendra la fin du XIXe siècle et la résurgence progressive des États balkaniques qui reprennent leur indépendance pour que finalement le pays renaisse et devienne définitivement indépendant à compter de 1908.
Il ne faut pas oublier, pour comprendre la situation actuelle, que le pays dut sa renaissance, à la fin du XIXe siècle, en grande partie grà¢ce au soutien de la Russie tsariste qui alors cherchait à pousser son influence vers le sud. Les deux guerres balkaniques et la première partie du XXe siècle devaient finalement amener la Bulgarie à faire partie du camp socialiste jusqu'à la fin de la guerre froide.
Par ailleurs, l'influence orthodoxe y reste très forte, ne serait-ce qu'au niveau de l'identité même du pays qui culturellement célèbre chaque année les saints Cyrille et Méthode, « inventeurs » entre autres de l'écriture cyrillique. Ce n'est que durant les années 1990 que la Bulgarie devait se tourner vers l'Occident, avec en premier lieu son adhésion au sein de l'OTAN en 2004 ‒ qui lui garantissait la protection militaire nord-américaine ‒ puis avec, en 2007, son entrée dans l'UE à la faveur de laquelle le pays espérait trouver l'opportunité d'entrer dans une dynamique favorable pour redresser son économie.
Il n'en fut hélas rien. Car si le pays devait en effet se moderniser et tant bien que mal voir son économie socialiste se convertir à l'économie de marché, en 2023, la Bulgarie reste encore le pays le plus pauvre de l'UE, bien loin dernière l'un de ses voisins directs : la Grèce, par exemple.
La situation économique et politique du pays est donc en perpétuelle crise. Des majorités ultra libérales se sont succédées alternativement avec des retours temporaires des partis de gauche, ou plus récemment des partis populistes comme le GERB de l'emblématique Boiko Borrisov, Premier ministre de 2009 à 2021 presqu'en continu.
Ce n'est donc que très récemment qu'une tendance pro-russe semble réapparaitre, notamment avec la victoire de l'ex-général Roumen Radev au pouvoir depuis 2017 et qui vient d'être réélu en 2021. Certes, la constitution bulgare n'accorde pas de grands pouvoirs au chef de l'État, mais les députés pourraient bien cette fois désigner ou confirmer un Premier ministre lui aussi à tendance russophile ; ce qui, dans le contexte actuel des rapports entre l'Union européenne et la Fédération de Russie, pourrait poser des problèmes.
Galab Donev, en effet, est Premier ministre depuis le 2 août 2022. Il est du même parti politique que le président Radev, le parti « Indépendant », et remplace donc depuis huit mois le libéral et pro-européen Kiril Petkov. Une coalition entre les libéraux et le parti GERB semble néanmoins se dessiner pour le mois de mai, sans que rien ne solutionne à court terme la crise générale, politique sociale et économique que connaît actuellement la Bulgarie.
Dr Olivier Buirette, Paris, le 15 mai 2023.