La Turquie, pays des fabuleuses découvertes archéologiques

On savait déjà que le territoire de la Turquie, offrant la particularité d’avoir connu une multitude de civilisations différentes, était d’une exceptionnelle richesse archéologique.

Par Gisèle Durero Köseoğlu
Publié en Mai 2023

Mais depuis quelques années, avec la multiplication des fouilles, le rythme des découvertes s’est accéléré et les surprises n’en finissent jamais !

A Istanbul, les deux dernières décennies ont été fertiles en événements archéologiques majeurs qui ont permis de réécrire peu à peu l’histoire de la cité. En effet, les travaux du Marmaray avaient entamé une sorte de révolution dans les connaissances historiques sur la ville, dans la mesure où l’on avait mis à jour des vestiges du Néolithique datant de 6500 av. J.-C, des témoignages du Chalcolithique, mais aussi des restes des Phéniciens, des Thraces et surtout des Mégariens, dont le roi, Byzas, avait fondé « Byzantion » au 7ème siècle av. J.-C ; ainsi que les décombres du port de Théodose avec sa quarantaine de navires coulés par les tempêtes. Quant aux trois dernières années, elles ont été caractérisées par d’inimaginables rebondissements. En 2021, à Fatih, les ouvriers réparant des conduites d’eau sont tombés sur une portion en bon état des murailles de la Corne d’Or. À Beşiktaş, les excavations destinées à la création d’une rame de métro ont permis de faire émerger 82 tombes datées de 3500 ans, dont 45 de type « kourgan », des caveaux recouverts d’un tertre, ainsi que des urnes de crémation, des offrandes funéraires, près de cavités remplies des feuilles de platane évoquant un rituel. L’année dernière, c’est un immense cimetière de l’époque hellénistique tardive qui a été trouvé dans le terrain situé à l’arrière de la gare de Haydarpaşa. Puis, les traces de quartiers byzantins et ottomans ont été exhumées près de la pierre du Million. Et, en avril 2023, une extraordinaire trouvaille a eu lieu dans le champ de fouilles des vestiges de l’église Saint-Polyeucte, à Saraçhane. L’église, qui était la deuxième plus grande basilique de la ville après Sainte-Sophie, endommagée au XIe siècle par un séisme, avait été pillée pendant la quatrième croisade et ses piliers, connus sous le nom de « Pilastri Acritani », avaient été emportés à Venise, où ils ornent encore la basilique Saint-Marc. Or, les archéologues ont eu la stupeur de découvrir un souterrain datant de 1500 ans, orné de mosaïques et de pierres disposées en dessins géométriques, qui a résisté aux séismes.

Quant au reste de la Turquie, il ne se passe pas un ou deux mois sans que l’annonce d’une incroyable découverte ne provoque l’émotion des historiens ! En 2021, lors d’une randonnée dans les monts du Taurus, un diplomate polonais féru d’archéologie localise par hasard la cité de Thébasa, décrite par Pline l’Ancien, dont de nombreux spécialistes avaient cherché en vain l’emplacement. La même année, près d’Urfa, dans le périmètre de deux-cents mètres carrés appelé « les Collines de pierre », où se situent douze sites inestimables dont le fameux Göbeklitepe, le plus vieux sanctuaire du monde, qui a remis en cause toutes nos connaissances sur la Préhistoire, a eu lieu, dans celui de Sayburç, la découverte d’une frise gravée vieille de onze mille ans, représentant un homme en haut-relief, nu, encadré par deux léopards, et un autre brandissant un serpent face à un taureau en train de le charger. Quelques mois plus tard, dans la même zone, à Karahan Tepe, lieu daté entre onze et treize mille ans, a été dégagée une fosse hérissée de plus de 250 mégalithes ornés de motifs d’animaux. Des têtes humaines sculptées dans la pierre, des cruches artistiquement confectionnées laissent penser qu’à cette époque, les hommes n’étaient pas que les frustes chasseurs-cueilleurs que l’on avait imaginés et permettent aux spécialistes de considérer ce site comme aussi époustouflant que celui de Göbeklitepe ! En avril 2022, une immense ville souterraine, Matiate, pouvant contenir jusqu’à soixante-dix-mille personnes, a été explorée à Midyat ; datant du IIème siècle, elle aurait été construite par les premiers chrétiens tentant d’échapper aux persécutions des Romains et serait peut-être la plus grande du monde. 

Les exemples que je viens de citer sont loin d’être exhaustifs, tant est riche en histoire la terre de Turquie. Mais une chose est certaine : toutes ces découvertes ne cessent de bouleverser les certitudes que nous croyions avoir sur la Préhistoire et l’Antiquité ! 

Gisèle Durero-Köseoğlu