Comme chaque année, j'ai eu l'honneur de participer aux célébrations du 29 Octobre à l'ambassade de Turquie à Paris. L'événement a réuni un public trié sur le volet. Pour la première fois, la cérémonie a eu lieu en journée, alors que toutes les autres auxquelles j'avais assisté auparavant se tenaient en soirée. Cette occasion marquait ma 21e participation à de telles célébrations.
L'Ambassadeur Yunus Demirer, entouré de ses collaborateurs, a accueilli chaque invité avec une chaleur égale. Des visages familiers du ministère des Affaires étrangères français étaient également présents, et cette année, ils étaient nombreux. J'ai eu l'occasion de croiser Bertrand Buchwalter, ancien consul général à Istanbul et conseiller du Président Emmanuel Macron, mais notre échange s'est limité à quelques mots, tant il y avait de personnes désireuses de lui parler.
Au cours de conversations brèves avec quelques diplomates récemment rencontrés au ministère des Affaires étrangères de France, j'ai constaté avec étonnement qu'ils ignoraient l'existence de notre journal. Cela témoignait, hélas, de la distance qui les sépare de certains enjeux culturels. Il est frappant qu'un journal mensuel en français, publié depuis vingt ans, n'ait pas attiré leur attention, surtout dans un pays comme la Turquie, où la langue de Molière n'est pas couramment parlée.
Le mercredi 6 novembre 2024, j'ai eu le privilège de rendre visite à Son Excellence Yunus Demirer, Ambassadeur de la République de Turquie en France, dans son bureau. Dès le contrôle de sécurité, l'accueil chaleureux a été un prélude à un échange empreint de cordialité et de sincérité. Et une fois de plus, je me suis rendu compte, après ma première rencontre avec lui le 19 décembre 2023, que mes premières impressions étaient parfaitement justifiées.
L'Ambassadeur Demirer se distingue par sa vision, sa simplicité et sa modestie. Il possède une rare capacité à écouter son interlocuteur avec une grande bienveillance. Tout ce qu'il a partagé ce jour-là témoigne de cette sincérité qui caractérise ses propos. Et ce mot « sincérité » mérite d’être souligné, car je puis affirmer, au fil de mes rencontres avec divers diplomates, que c'est une qualité que l'on ne rencontre pas souvent à ce degré. Dans un monde où le langage diplomatique est souvent dénué de chaleur humaine, il incarne un modèle de franchise, de confiance et d'authenticité.
Notre entretien avait pour but de demeurer informel, et l'Ambassadeur a répondu à cette demande avec une grande courtoisie et une maturité rare. Après un échange sur des sujets de pure forme, nous avons abordé des questions plus spécifiques. Il a brièvement évoqué l’histoire des relations franco-turques, rappelant la position stratégique et géopolitique particulière de la Turquie. Il a souligné que bien que la Turquie accorde une importance capitale à ses relations avec l'Europe et la France, celles-ci n'ont pas encore atteint le niveau qu'elles méritent. Cette situation découle moins des relations bilatérales que de divers enjeux régionaux et des questions liées à l'Union européenne, dont la France est l'un des moteurs. Cependant, la Turquie, par sa position géographique et sa puissance, est l’un des pays les mieux placés pour contribuer à la stabilité, à la paix, à la sécurité et à la prospérité économique de l’Europe. Le processus d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne serait un véritable atout pour l’ensemble de l’UE. La Turquie, dit-il, est un acteur capable de jouer un rôle majeur dans la résolution des crises et conflits régionaux.
Nous sommes rapidement passés à deux questions plus d'actualité. La première concernait les visas. Il m'a confié qu'ils recevaient de nombreuses plaintes concernant les difficultés rencontrées par nos citoyens. « Les hommes d'affaires, les étudiants, et même ceux venant de pays de l'UE, se heurtent à de grandes difficultés, non seulement pour obtenir un visa, mais pour obtenir un simple rendez-vous auprès des agences intermédiaires des États concernés », m’a-t-il expliqué. C'est une situation qui, selon lui, n’était pas compréhensible et qui a été soulevée à tous les niveaux auprès des autorités des États membres de l'Union européenne.
La deuxième question portait sur les écoles des ambassades en Turquie, un sujet devenu récemment source de tensions entre nos deux pays. Lorsque je lui ai rappelé que cela concernait les lycées Charles de Gaulle à Ankara et Pierre Loti à Istanbul, il a calmement expliqué : « Ces écoles ont été créées à l'origine pour les enfants des membres des représentations diplomatiques françaises, mais aujourd'hui, une grande majorité de leurs élèves sont turcs. » Il a ajouté que près de 80 % des étudiants dans ces établissements étaient des citoyens turcs, ce qui posait problème car ces écoles ne bénéficient d'aucun statut juridique en Turquie et, selon la législation turque, ne devraient donc pas accueillir des élèves turcs. Il a aussi souligné que la France était parfaitement consciente de cette situation, qui n’est pas nouvelle puisqu'elle existe depuis 2009, voire plus longtemps. « Il est impératif qu’un accord entre nos deux pays soit conclu, incluant la régularisation du statut juridique de ces établissements », a-t-il insisté. Il a précisé que la France ne semblait pas avoir apporté de réponses claires aux propositions de la Turquie sur ce sujet. L'Ambassadeur a déclaré que la situation actuelle ne pouvait perdurer et qu'un accord sur l'éducation entre les deux pays devait être signé dans les plus brefs délais. La Turquie attendait une réponse constructive de la part de la France.
J'avais depuis longtemps perdu l'habitude de discuter avec un diplomate aussi accessible, aussi clair et aussi sincère dans ses propos. Je lui ai exprimé mes remerciements pour cette rencontre, et il m'a accompagné avec une amabilité qui ne faisait que renforcer la chaleur de l'échange.
Je n'avais plus qu’à rédiger cet article.
En novembre, deux autres événements ont retenu mon attention, et je me dois de les mentionner dans cet écrit.
L'invitation de Madame Ebru Sanver
Le 13 novembre 2024, après plusieurs invitations, j'ai enfin eu l'opportunité de me rendre chez Madame Ebru Sanver. À chaque fois, j'étais soit à Paris, soit ailleurs. Ce soir-là, nous avons partagé un dîner délicatement préparé, en présence de nombreux invités prestigieux. Ce dîner, organisé en l'honneur de Madame Nadia Fanton, Consule générale de France à Istanbul, et de son époux, fut l’occasion de discussions animées. J'ai eu le privilège de converser longuement avec le professeur İlber Ortaylı. Le discours de Remzi Sanver, brillant en turc et en français, a captivé les invités. Dans son intervention, il a parlé de l'amitié entre les nations, de la fraternité entre les peuples, et a adressé des vœux de paix et d’unité à l’humanité. Madame Ebru Sanver, fidèle à elle-même, a remercié les participants avec une simplicité pleine de grâce.
La Fête du Roi de Belgique
Le 18 novembre 2024, la Fête du Roi de Belgique a été célébrée dans la somptueuse résidence de l'Ambassade belge à Istanbul, rue Sıraselviler, en présence d'un grand nombre d'invités. Après le discours de Monsieur le Consul général Tim Van Anderlecht, un concert de Ramazan Sesler, qui a interprété les hymnes nationaux turc et belge à la clarinette, a séduit l'auditoire.