Par cet après-midi d’été, nous sommes allés à Feneryolu visiter le nouvel emplacement du magasin İpek Hanımın Çiftliği (la Ferme de Mademoiselle İpek). Déjà clients du magasin de Kalamış, nous avons découvert leur nouveau magasin de Fenerbahçe. Suite à des travaux de transformation, İpek Hanımın Çiftliği accueille ses clients à sa nouvelle adresse : Fener Kalamış Caddesi n° 98.
Ce nouvel endroit est lui aussi spacieux et accueillant. Après avoir fait nos emplettes, nous avons eu l’occasion de rencontrer Mme Pınar Kaftancıoğlu, fondatrice d’İpek Hanımın Çiftliği, dans son nouveau magasin.
Car İpek Hanımın Çiftliği est devenu une marque qui grandit et œuvre à son développement. Avec ses magasins à Istanbul, Ankara, Izmir, Bodrum et même Kars, İpek Hanımın Çiftliği dispose d'une clientèle considérable. Lors de notre entretien, Pınar Kaftancıoğlu nous a longuement parlé de ses magasins et des processus de production, de la ferme à la distribution.
Ses magasins, situés dans des endroits prisés d'Istanbul, reçoivent une clientèle d’élite et de gourmets. On y rencontre des personnalités célèbres, du monde de la télévision et du cinéma à la politique. Quiconque se soucie de ce qu’il mange, s'intéresse à l'alimentation et à l’agriculture biologique, se positionne pour des processus de production-consommation locale et le commerce équitable, vient ici.
L'histoire de Pınar Kaftancıoğlu commence avec les fruits et légumes qu'elle cultivait elle-même pour sa fille İpek. Ces fruits et légumes bio, d'abord distribués aux amis et aux voisins, vont au fil du temps faire l’objet de commandes, puis nécessiter l’ouverture d’un magasin physique. C’est ainsi qu’elle s'est engagée dans cette voie, et s’est fait connaître aux habitants d’Istanbul par ses produits bio et éco-responsables d’une agriculture transparente, cultivés sur ses propres terres à Nazilli.
Le succès d’İpek Hanımın Çiftliği vient du fait que Mme Kaftancıoğlu a présenté une solution au problème de l'accès à une alimentation biologique et écologique, crucial pour les Stambouliotes ou autres habitants des grandes villes. Certes, il existe des marchés biologiques à Istanbul, mais ils pratiquent des prix exorbitants, leur approvisionnement ou la variété des produits peuvent être limités. L’entreprise, qui n’a pas démarré dans un but commercial, poursuit ses objectifs biologique et écologique. Étant en concurrence avec d'autres marchés, elle occupe une position importante sur le marché bio en maintenant l'équilibre des prix pour certains produits.
Habituée à la saveur des produits de Yozgat où je me rends de temps à autre, je n’ai jusqu'à présent trouvé leur équivalent que dans les produits de Mme Pınar. Car à Istanbul, on ne trouve malheureusement pas de tomates, de poivrons, de légumes verts dignes de ce nom. L'année dernière, juste pour cette raison, j'ai acheté un plant de tomates et de poivrons à Mme Pınar. Je les cultive sur mon balcon. Ils ne se sont pas desséchés et produisent en continu des légumes savoureux. Je vous recommande d'y acheter des plants au printemps.
Dans le magasin de Mme Pınar, vous trouverez, outre les fruits et légumes, de nombreux produits tels que des céréales, du blé, des légumes secs, des nouilles, des épices, des produits laitiers, du fromage, de la viande, du concentré de tomate, de l'huile, des olives... Il y a aussi un rayon traiteur, avec des pâtisseries et des préparations de légumes qui peuvent être congelées...
Votre ferme s’est considérablement développée. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Au départ, il n’y avait qu’un terrain et une ferme. C’est à présent une ferme immense, toujours située à Nazilli. Son projet a été conçu par Wageningen University & Research : ils en ont préparé le plan et l'ont intégré dans leurs travaux. Cette immense ferme nécessite beaucoup de travail. La préparation de la terre, les semailles et la plantation sont des processus distincts, puis il y a la récolte tôt chaque matin. Les produits récoltés sont triés de la façon suivante. Les plus beaux et bien calibrés sont mis en caisses pour rejoindre les magasins. Les autres, nous les évaluons selon leur état (déformés, écrasés, très petits ou grands, tombés au pied de l'arbre) : selon leur nature, nous en faisons du vinaigre, des cornichons, des confitures, des conserves ou les utilisons en pâtisserie. Ainsi, nous travaillons dans une logique zéro déchet, où rien ne se perd.
Pouvez-vous nous parler de votre clientèle et de vos collaborateurs ?
Nos clients sont des familles qui tiennent au circuit court, sans manipulation ni emballage. Ils fabriquent eux-mêmes leurs confitures, et achètent généralement en gros. Ils sont devenus nos amis, et nous partageons les mêmes valeurs : nous adorons les chats et les chiens, et il nous est impossible de tuer un poulet. Nous n'abattons pas les vieux coqs de notre ferme, nous prenons soin de nos moutons jusqu'à ce qu'ils meurent de cause naturelle. La viande est vendue dans les magasins, mais nous ne l'abattons pas.
Et dans mon équipe, il en est de même, tout le monde est une « Pınar » ! En fait, je suis peut-être la personne qui à présent travaille le moins dans cette équipe. Tout le monde effectue un travail remarquable.
Vos lettres hebdomadaires sont très appréciées. Qu’est-ce qui vous les inspire ?
Les sujets sont choisis selon les questions que l’on m’a le plus posées, ou ce qui intéresse le plus les gens sur les réseaux sociaux ou à la télévision. J'ai écrit sur tous les sujets auxquels vous pouvez penser : des produits qui partent et reviennent de l'étranger : fruits secs, légumes, fruits et citrons… ; des affirmations absurdes sur les poules élevées en plein air, les animaux mangeant de l'ensilage de maïs... Le médecin a conseillé de boire du lait de chèvre : quel lait de chèvre, est-il vendu sur le marché etc. Et les œufs verts, pourquoi sont-ils plus chers… Là, j'essaie de couper court à ce genre de discussion stérile, et je pense que je commence à y parvenir. Ma mère était professeur de littérature et mon père était écrivain, je pense que cette capacité d'écriture vient d'eux, j'écris très facilement.
Nous ne sommes pas « comme une famille », nous sommes une entreprise familiale !
Pour moi, nous ne faisons rien de spécial ou de très spécifique : nous le faisons simplement de la manière dont cela doit être fait. Il n'y a pas de franchisation, tous les magasins m'appartiennent. Nous n'avons aucune ambition de profit, nos amis calculent comment nous pouvons livrer les produits aux gens au moindre coût, je ne m’en occupe même pas. Tous ceux qui travaillent à mes côtés viennent de Nazilli, parents et amis, et nous transmettrons sans doute İpek Hanımın Çiftliği à nos enfants. Par exemple, Melek et son mari travaillaient ici ; son fils et sa belle-fille y travaillent à présent. Tous ceux que j'ai rencontrés lors d’une kermesse à Nazilli et qui se sont impliqués dans l’entreprise en sont propriétaires. Il y en a un qui travaille avec moi depuis 25 ans. Je ne suis ni au second, ni au premier plan, je ne donne de directives à personne, et chacun fait tout, comme moi. Les employés sont la sœur, le cousin, le père de quelqu'un, nous sommes tous liés les uns aux autres. Comme on dit, nous sommes « comme une famille », ou plutôt, nous sommes vraiment une grande famille qui se charge de tout le travail.
En ce qui me concerne, je fais la planification, et la R&D m’incombe. C'est une entreprise de taille moyenne, elle emploie 350 personnes, et elle est devenue un exemple. Tout le monde veut nous rencontrer et avoir notre avis. Je les aide autant que je peux. Je suis une source d’inspiration pour beaucoup de femmes, et j’en suis vraiment très heureuse.