« C'est votre anniversaire. Dès six heures du matin, vous recevez des messages de la part des marques auxquelles vous êtes abonné, comme Netflix, Spotify ou Nespresso. (un article de Hannah Betthomé)
Voilà ces nouveaux compagnons qui devancent vos proches en usant d'un ton affectueux – disons plutà´t mielleux – et de formules telles que "cher, chère abonné(e)" ou "vous êtes précieux pour nous". Pour ce grand jour, ils vous offrent des cadeaux, des bons ou des petites réductions. Même si vous supprimez les mails, vous vous laissez doucement séduire. » C'est ainsi que Violaine des Courières résume notre nouveau modèle de société dans un article pour le journal Marianne. Bienvenue dans la société de l'abonnement...
La France est le troisième pays européen en matière de souscription, avec près de 50 millions forfaits actifs en 2021. Les marques les plus plébiscitées sont les clubs de sport, Netflix, Deezer, les jeux en ligne et les applications sur Apple. Le journaliste Cyril Brosset explique qu'une étude sur le sujet a été menée en 2020. « Il apparaissait que les premières dépenses d'abonnement des Français appartenaient au secteur des loisirs », rapporte-t-il.
Seulement, bien que le concept de l'abonnement ait été popularisé par des plateformes comme Netflix ou Spotify, il est à présent possible de souscrire à des abonnements pour avoir accès à tous les services possibles et imaginables. Qu'il s'agisse de films, de musique, de podcasts, de livraison de nourriture, de jeux vidéo, de vêtements... Et même de brosses à dents !
Les dernières années ont été le terrain de développement d'une vraie économie de l'abonnement, tout en s'immisçant peu à peu dans nos vies quotidiennes.
Les marques jouent constamment sur l'émotion, qui est le premier ressort de ce marché du « lien ». Pour que les consommateurs ne se lassent pas et continuent de trouver une satisfaction dans leurs abonnements, le marketing est sans cesse à la recherche de nouveaux concepts innovants. Par exemple, en plus de donner la capacité au client de pouvoir personnaliser sa box selon ses habitudes alimentaires, le géant HelloFresh, qui est spécialisé dans la livraison de repas cuisinés préparés avec des produits frais, joue actuellement sur la magie de Noël pour promouvoir un kit spaghetti, « Buddy the Elf ».
Nous faisons ainsi face à une véritable transformation sociétale, notamment vis-à -vis de la notion de « possession » des biens. Le modèle d'abonnement a infusé toute la société pour transformer de façon radicale les fondamentaux du XXe siècle : la voiture par exemple, ne constitue plus l'objet de convoitise numéro un de la société de consommation capitalistique. La possession du véhicule s'estompe de plus en plus chez les jeunes, pour des questions de coût, mais surtout d'habitudes de vie. Peut-on ainsi estimer que la société du bien que l'on possède est en train de mourir à petit feu ? Ce qui est certain, c'est que le fait de posséder des biens à long terme n'est plus une référence érigée en monument. Internet crée de nouvelles façons de consommer en appréhendant les attentes de chaque consommateur et en lui apportant une réponse selon ses besoins.
La sociologue Laurence Allard a d'ailleurs pu souligner que l'économie de l'abonnement a été popularisée et vulgarisée par Jeremy Rifkin dans son ouvrage L'à¢ge de l'Accès en 2000. Elle explique ainsi qu'être « abonné, adhérent, client, devient aussi important qu'être propriétaire. C'est de l'accès plus que de la propriété que dépendra désormais notre statut social. » Enfin, ce qui est vendu avec l'économie de l'abonnement, c'est une expérience individualisée, un service qui se substitue au bien.
Hannah Berthomé