Déplacement massif de la population (1,9 million de personnes), convocation de l'État d'Israël à la Cour internationale de justice et nouvelle grande offensive à Rafah : la guerre ravage Gaza depuis plus de 120 jours. (un article de Clara Marque)
Haydar à‡akmak, professeur de politique à l'Université Gazi à Ankara, répond aux questions d'Aujourd'hui la Turquie.
Avec la récente affaire qui bouscule l'UNRWA, l'agence de l'ONU qui devrait cesser ses activités à la fin du mois, dans un contexte de famine grandissante et de contamination des sols, de l'eau et de l'air, se dirige-t-on vers la plus grave crise humanitaire du siècle ?
Des pays anglo-saxons tels que les États-Unis, le Canada et le Royaume-Uni, ont suspendu leur aide à l'UNRWA, un programme de l'ONU créé en 1949 pour soutenir les réfugiés palestiniens dont les droits ont été usurpés à la création de l'État d'Israël. Cette attitude occidentale soutient l'agression israélienne. Les États-Unis et Israël doivent trouver un autre moyen de punir le Hamas, car couper l'aide pour voir cesser les activités de cette organisation revient à punir la population civile.
Qui, selon vous, gagne la bataille de l'opinion publique internationale à l'heure actuelle ? Que pensez-vous de l'opinion occidentale sur la question de Gaza ?
Le lobby israélien, réputé pour influencer facilement les journalistes et les politiciens, peine semble-t-il à influencer les grandes masses. L'opinion publique internationale semble moins induite en erreur que les années précédentes, puisque les gens ont accès à plusieurs sources d'informations. Avec les possibilités offertes par la technologie, ils peuvent recueillir des témoignages multiples grà¢ce aux réseaux sociaux. Dès lors, l'opinion publique mondiale, en ce compris les pays occidentaux, s'est majoritairement placée du cà´té du peuple palestinien, innocent et victime. L'action devant la Cour internationale de justice de la part de l'Afrique du Sud en est un exemple : cette plainte a été accueillie par la population sudafricaine et la communauté internationale.
Connaît-on actuellement une guerre régionale au Moyen-Orient ? Comment qualifier les politiques étrangères des États engagés dans la guerre ? Et certaines d'entre elles pourraient-elles faire basculer le cours des évènements ?
Pour l'instant, les États-Unis et la Grande-Bretagne tentent d'éviter la guerre générale dans la région, qui serait inopportune pour ces puissances. En effet, il semble peu probable qu'elles déclarent la guerre à l'Iran, pour les raisons suivantes : du point de vue des pays impérialistes, un Iran impuissant crée un vide dans l'équilibre du Moyen-Orient. Il ne serait pas possible d'équilibrer l'Arabie Saoudite et l'Égypte, qui ont un rà´le à jouer dans la vente et la possession d'armes, avec une menace iranienne. Même s'ils se présentent comme alliés, les États-Unis, la Grande-Bretagne et Israël utilisent l'Iran contre la Turquie et l'Azerbaïdjan et, de ce point de vue, n'ont pas intérêt à mener une politique destructrice contre l'Iran. Ces pays savent aussi que la Chine et la Russie apporteront indirectement une aide à la guerre iranienne, ce qui transformerait la situation géopolitique en guerre majeure, longue, mondiale, et épuisante. Ouvrir une guerre avec l'Iran signifie ouvrir une porte à la Chine et la Russie. Ils ne veulent pas entrer dans une guerre qu'ils ne peuvent pas gagner.
Clara Marque