La plus jeune députée néo-zélandaise marque son entrée au parlement par un haka

Le haka ? Lorsque l’on entend ce terme, il est commun que la première chose qui vienne à l’esprit soit la danse guerrière exécutée par l’équipe de rugby néo-zélandaise. (un article de Hannah Berthomé)

Par Aujourd’hui la Turquie
Publié en Mars 2024

En réalité, les All Blacks dansent le Ka mate !, ou Te Rauparaha haka. Le Ka mate raconte l’histoire du guerrier Te Rauparaha poursuivi par ses ennemis. Pratiqué en contexte sportif, il renvoie à la peur de la défaite et à la volonté de vaincre.

En fait, le haka n’est pas qu’une danse guerrière. En maori, haka est le terme générique pour la danse. Il y en a donc une infinie variété, pouvant exprimer la joie, la colère, le désir de vengeance. Le haka peut également avoir des connotations sexuelles, ou encore souhaiter la bienvenue aux visiteurs… Ainsi, le haka a toujours fait partie de l’histoire des Néo-Zélandais. Vrai rituel maori, il occupe une place sacrée en Nouvelle-Zélande, jusqu’à être enseigné à l’école et concurrencer l’hymne national. Il exprime la passion, la force et l’identité d’un peuple. Il incarne par ailleurs la maorisation, dans une certaine mesure, de la société néo-zélandaise. Ce poids de la culture maorie peut notamment s’expliquer par l’histoire particulière de l’archipel : contrairement aux aborigènes d’Australie, les Maoris ont toujours été redoutés par les colonisateurs, et leur résistance héroïque a empêché les Blancs de s’imposer et de devenir la « race dominante ».

C’est ainsi que la jeune députée maorie Hana-Rawhiti Maipi-Clarke, fraichement élue, a marqué son entrée au parlement par un haka réalisé en pleine séance. À seulement 21 ans, elle devient la plus jeune députée néo-zélandaise. En combinant son premier discours avec ce haka mémorable, elle a sidéré l’entièreté du parlement, tous partis confondus. Alors que son peuple indigène dénonce la politique raciste du nouveau gouvernement conservateur, Hana-Rawhiti Maipi-Clarke a appelé les Maoris à tenir tête au Premier ministre Christopher Luxon. Elle a ainsi lancé : « Ce gouvernement a attaqué mon monde de tous les côtés : notre santé, notre environnement, notre eau, notre terre, nos ressources naturelles, nos quartiers maoris, notre langue, nos enfants et mon droit, ainsi que le vôtre, d’être dans ce pays, selon notre constitution (…) Je suis à votre service, à l’intérieur et à l’extérieur de ce parlement. Je mourrai pour vous dans cette Chambre, et je vivrai pour vous à l’extérieur de ces murs. »

Depuis le mois de novembre dernier, la Nouvelle-Zélande est en effet gouvernée par une coalition tripartite dirigée par le conservateur Christopher Luxon, chef du Parti national et ancien PDG d’Air New Zealand, allié avec la droite libérale d’ACT et les populistes de New Zealand First. Le nouveau gouvernement avait alors affiché comme priorités des allègements fiscaux, la lutte contre la criminalité, la modernisation des transports publics et la réalisation de nombreux projets routiers.

Mais cette coalition de droite est pointée du doigt par la population autochtone maorie qui l’accuse de mener des politiques racistes, et notamment de menacer un traité qui protège les droits des peuples autochtones. Début décembre, des milliers de manifestants sont ainsi descendus dans les rues de Nouvelle-Zélande pour protester contre les politiques du nouveau gouvernement à l’égard de la population maorie. Ils s’opposent notamment au projet de renommer en anglais certains départements au nom maori, ainsi qu’au projet de fermeture de l’autorité sanitaire maorie, Te Aka Whai Ora.

Le parti maori a obtenu seulement six sièges à l’issue des élections législatives néo-zélandaises de 2023, alors que la Chambre des Représentants en compte 123, dont 49 acquis par le Parti national : ce qui a permis à Christopher Luxon, chef de cette formation conservatrice, de devenir Premier ministre après six années de pouvoir du Parti travailliste.

Hannah Berthomé