Rouge

En ruine… À la veille de la première grande guerre que le monde a connue, l’Empire était en ruine. Il était vaincu. Épuisé par un long siècle qui n’en finissait pas, il avait témoigné d’interminables guerres fratricides entre et contre les peuples qui la composaient. D’un empire pluriséculaire qui régnait jadis sur trois continents,

Par Ali Türek
Publié en Janvier 2024

C’est sur ce bout de territoire que quelques années plus tard, un nouvel État est né. Au terme d’une guerre qui a su mobiliser un fort sentiment d’appartenance nationale, la question d’Orient était finalement réglée dans cette partie de la Terre. De l’Empire ottoman, il ne restait plus que des cendres, la Turquie moderne pouvait naître.

La suite de l’histoire est bien connue. Quinze ans ont suffi à balayer le lourd héritage de l’ancien régime. Un nouvel État, une nouvelle société... Tel était le mot d’ordre de la révolution qui s’y était mis en marche. Le vainqueur de la guerre d’indépendance avait un pari : la République qui était proclamée un 29 octobre allait et devait créer un nouvel individu, un nouveau peuple, une nouvelle société. 

Cette République allait connaître et a connu de nombreux hauts et bas durant son trajet au cœur du siècle. Sur un vaste territoire laissé de l’Empire, elle a mené l’effort considérable d’une modernisation, d’un progrès technique et de l’accès aux soins et à l’éducation… Certes, à marche forcée, mais elle a réussi. Elle a cherché la sécularisation dans tous les aspects de la vie sociale. Poursuivant son objectif d'occidentalisation, elle a été le membre à part entière du concert européen et des alliances outre-Atlantique dès leurs débuts. 

Mais elle en a aussi connu, des bas. Combien d’obstacles ont voulu changer le cours de sa marche lorsqu’elle pensait se diriger, dans une petite lueur d’espoir, vers un renouveau démocratique véritable ? Combien de fois son élan a été coupé de court par des interventions ? Sur cette marche républicaine, des coups bas, le pays en a beaucoup connu. Chaque fois, ceux qui intervenaient dans la vie politique se croyaient invincibles, intemporels. Chaque fois, le peuple qui applaudissait leurs premiers jours de gloire a su leur donner tort. Maintes fois structuré et restructuré par le haut, le système a su revenir au jeu démocratique dans les plus brefs délais par le bas. 

Cela pouvait rester la seule lecture, la meilleure peut-être. Mais il en existe une autre, moins colorée. C’est qu’enfermé dans un cadre politique qui ne lui convient point, le pays n’a peut-être jamais su se débarrasser de ses vieux démons qui le hantent profondément encore. Et ce n’est peut-être pas tout de suite que les choses vont changer. Peu importe…

Peu importe, car la force de son peuple est là, par les mille et une richesses créées sur son sol. Par la musique, les couleurs, les livres, la danse, la cuisine, les idées… Le pays va bien au-delà de la médiocrité régnante. Il va loin et plus loin. 

La République, qui était proclamée un 29 octobre, a-t-elle véritablement réussi tous les paris de son grand fondateur ? 

Elle a aujourd’hui cent ans. Elle est encore très jeune et reste le fondement de tout idéal de justice, d’égalité et de progrès social. 

Vive la République !

Ali Türek